"De quoi sommes-nous riches ?"

« Il ne fait aucun doute qu’il existe un monde invisible. Cependant, il est permis de se demander à quelle distance il se trouve du centre-ville et jusqu’à quelle heure il est ouvert. » (Woody Allen).

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Marc 10.17-30

Comme il se mettait en route, quelqu’un vint en courant et se jeta à genoux devant lui ; il lui demandait : « Bon Maître, que dois-je faire pour recevoir la vie éternelle en partage ? » 18 Jésus lui dit : « Pourquoi m’appelles-tu bon ? Nul n’est bon que Dieu seul. 19 Tu connais les commandements : Tu ne commettras pas de meurtre, tu ne commettras pas d’adultère, tu ne voleras pas, tu ne porteras pas de faux témoignage, tu ne feras de tort à personne, honore ton père et ta mère. » 20 L’homme lui dit : « Maître, tout cela, je l’ai observé dès ma jeunesse. » 21 Jésus le regarda et se prit à l’aimer ; il lui dit : « Une seule chose te manque ; va, ce que tu as, vends-le, donne-le aux pauvres et tu auras un trésor dans le ciel ; puis viens, suis-moi. » 22 Mais à cette parole, il s’assombrit et il s’en alla tout triste, car il avait de grands biens. 23 Regardant autour de lui, Jésus dit à ses disciples : « Qu’il est difficile à ceux qui ont les richesses d’entrer dans le Royaume de Dieu ! » (TOB).

 

Un ciel presque sans nuage…

La question, à peine ironique, de Woody Allen jette un éclairage intéressant sur l’histoire de l’homme riche. Il y a peu de place pour le doute dans la vie de cet homme. Dieu, dans son monde invisible, existe, et, par sa Loi, il guide les hommes. Une vie est stabilisée entre deux points fixes où orthodoxie et orthopraxie se conjuguent harmonieusement pour former un système clôs, sans question. Pourtant cet homme accourt (v.17) comme si sa vie en dépendait, comme quelqu’un qui craindrait de manquer l’heure du rendez-vous au centre-ville. Cette course est l’expression d’un manque existentiel, d’une sourde inquiétude que ni le catéchisme, ni la morale n’ont su apaiser. Cet homme a l’honnêteté de le reconnaître et de l’exprimer : « Que dois-je faire pour hériter la vie éternelle ? » (v.17).

Avoir ou être, il faut choisir

La rencontre de l’homme qui court avec l’homme qui est en route  (v.17) s’annonce comme un choc frontal. L’entretien arrive vite à son point de rupture. Plaire à Dieu et faire le bien apaise sans doute la conscience mais ne remplit pas une vie.

« Va. Tout ce que tu as vends-le… et ouvre-toi à ce que tu n’as pas encore. Ce que tu n’as pas, c’est la liberté de te détacher de ce que tu as ! La liberté de suivre celui qui t’appelle à saisir l’héritage que tu cherches. » C’est l’appel de Marc 8.34-38, réitéré par Jésus ici : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, prenne sa croix et qu’il le suive. »

Jésus n’invite pas l’homme riche à une nouvelle performance religieuse, un sacrifice salutaire, comme s’il suffisait de devenir pauvre pour être sauvé – ce serait alors un autre commandement, un autre joug. Il l’invite à « changer la nature même du trésor qui l’habite » (E. Cuvillier – Evangile de Marc, Bayard, 2002), à passer du registre de l’avoir-pour-soi, à celui de l’être-en-relation.

De quoi sommes-nous riches ?

Pourquoi les riches sont-ils aussi vivement critiqués par Jésus (v.23 ; voir aussi Jacques 5.1-6) ? Sans doute parce qu’ils se situent aux antipodes de l’esprit d’enfance donné en exemple par Jésus dans l’épisode précédent (10.15). Le riche, à la différence de l’enfant, ne dépend de personne, n’attend rien des autres et ne se confie à personne. Le malheur du riche, c’est une vie qui ne tient qu’à une chose et non à quelqu’un. Il s’entoure de la plus froide des solitudes, de la plus terrible des tristesses. Pour le Christ, il n’y a de vie que dans l’amour et la vie du riche se meurt sans qu’il n’en sache rien.

Un choix impossible…

Nous aurions tant aimé au fond de nous qu’il réussisse, l’homme riche ! Qu’il trouve au fond de lui la force d’aller, de vendre tout et de suivre Jésus. Nous l’aurions salué ce héros et célébré ce grand saint ! Mais il échoue. Il ne parvient pas à franchir les limites dans lesquelles sa vie est enfermée. Personne n’y parvient en réalité – pas plus les disciples que les croyants que nous sommes, héritiers de vingt siècles de christianisme.

Les projecteurs du récit sont maintenant braqués sur le lecteur. Nous sommes des possédants, riches de nos certitudes, de nos traditions et de nos suivances. Nous préférons, comme l’homme riche, rester dans les limites du raisonnable et a fortiori quand ce raisonnable s’appelle l’Eglise ! C’est de tout cela que Jésus nous appelle à nous affranchir. Mais à ce compte-là, qui peut être sauvé (v.28) ? La réponse de l’Evangile est simple et à même de nous remplir de tristesse : personne !

De la course au cheminement

Les matériaux philosophiques, économiques, politiques et religieux que nous assemblons au long d’une vie pour construire n’ont que l’apparence de la solidité. La course contre la montre et contre la mort dans laquelle nous sommes engagés est perdue d’avance.  Le salut est lié à la rencontre, à l’attachement et au cheminement avec la personne de Jésus-Christ. Le renoncement en lui-même n’a pas de valeur, pas plus que le mouvement intérieur de conversion. C’est ce que ces étapes produisent en termes de vision du monde et de changements mesurables, qui intéresse le Christ. La vie, telle que l’Evangile la proclame, est au fond une question de regard. Fixerons-nous les yeux sur le poids des enjeux, l’évaluation des risques et des conséquences ? Lèverons-nous au contraire les regards vers la vocation lumineuse que nous adresse le Christ ? De quoi sommes-nous riches ?

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