Aller à l’Eglise : un départ ou une arrivée ?
Cette question ne s’est jamais posée de façon aussi cruciale que depuis le mois de février 2014. Le temple de l’Eglise protestante française de Beyrouth a été détruit. Depuis, nous faisons Eglise sans temple (ce qui est certainement moins commun que de faire Eglise sans pasteur.) Nous n’avons plus d’endroit où poser notre tête. Ceci est sans comparaison avec la situation de la communauté protestante africaine de Villeneuve d’Ascq traumatisée depuis l’incendie criminel qui l’a mise à la rue. Nous, nous bénéficions d’un accueil tout confort à l’hôtellerie du Collège Protestant Français. Mais pour nombre de paroissiens, quelque chose s’est cassé et ne fonctionne plus. « On n’est plus chez soi », entend-on ; ou encore : « On était tellement bien avant dans notre temple ! ». Certains paroissiens ont cessé de venir au culte attendant peut-être la reconstruction du temple…
Un jour dans tes parvis…
Un jour dans tes parvis vaut mieux que mille ailleurs ! Cela me rappelle cet ami qui me disait que ce qu’il appréciait le plus dans les voyages, c’était le retour à la maison ! Appliquée à la vie d’Eglise, cette petite phrase exprime tout ce que la foi chrétienne n’est pas. L’Eglise n’est pas un cocon de bien être dans l’entre soi des fils de Coré (v.1). Elle n’est pas une fin, une arrivée, une situation, mais un point de départ, une rame de lancement vers une aventure de vie que l’on appelle aussi « mission ». Dès que l’Eglise devient une fin en soi, une société dont la préoccupation première est de s’édifier elle-même, je suis convaincu qu’elle ne tarde pas à perdre son chemin (c’est le Christ qui édifie son Eglise, pas les chrétiens !). Pour le dire autrement, le parvis du Seigneur aujourd’hui, c’est la rue, le monde, les gens : la tente des infidèles (v.11b). Partout où se trouve le Seigneur, là est le chrétien. L’Eglise est un lieu de retraite temporaire, d’écoute de la Parole de Dieu, d’enseignement et de fraternité. Mais à chaque fois que l’on s’y sent bien, il faudrait pouvoir en partir.
Allez-vous en sur les places et sur les parvis…
Le Christ nous envoie sur les places et les parvis à la rencontre des estropiés, des aveugles et des pauvres (Luc 14.21). Notre mission est de les presser de venir au repas de fête. Une fois repus, ils partiront à leur tour à la recherche d’autres amis. Le Christ nous prêche un Evangile de l’inconfort. Il n’a que faire de disciples grassouillards qui ne quittent jamais la table ! L’engagement chrétien ne se résume pas à un culte tous les dimanches.
Respirez !
Avez-vous remarqué le petit mot placé entre les versets 5 et 6 ? Il y a écrit : « PAUSE »
« 5 Heureux les habitants de ta maison : ils te louent sans cesse ! PAUSE. 6 Heureux l’homme qui trouve chez toi sa force : de bon cœur il se met en route »
La pause nous invite premièrement au silence ; elle nous prépare à passer d’un registre à un autre. Elle suggère une transition, impose une respiration entre deux couplets, un repos avant la mission. Qu’aux louanges d’un instant dans la communauté de Dieu, succède le départ pour cette aventure humaine indispensable et salutaire que le Christ a vécue avant nous.