Le sermon du lendemain

Lundi 19 juin 2017

« Peut-on apprendre à prier ? »

1 Thessaloniciens 5.17-18

1 Thess 5.17-18

«Priez sans cesse ! Rendez grâce en toute circonstance. Voilà ce que Dieu demande de vous, dans votre vie avec Jésus-Christ.»

Romains 8.26-27

"L'Esprit Saint aussi nous vient en aide, parce que nous sommes faibles. En effet, nous ne savons pas prier comme il faut ; mais l'Esprit lui-même prie Dieu en notre faveur avec des supplications qu'aucune parole ne peut exprimer. Et Dieu qui voit dans les cœurs  comprend ce que l'Esprit Saint veut demander, car l'Esprit prie en faveur des croyants, comme Dieu le désire."

Colossiens 3 :17 : « Quoi que vous fassiez, en parole ou en œuvre, faites tout au nom du Seigneur Jésus, en rendant grâces par lui à Dieu le Père. »

1 Corinthiens 10 :31 : « Quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu"

Luc 11.1-2 :

Jésus priait un jour en un certain lieu. Lorsqu'il eut achevé, un de ses disciples lui dit: Seigneur, enseigne-nous à prier, comme Jean l'a enseigné à ses disciples. Il leur dit : Quand vous priez, dites : « Père! Que ton nom soit sanctifié; que ton règne vienne. »

Je vous l'avais annoncé il y a plus d'un mois, je n'étais plus en mesure de vous adresser mes sermons. L'un de mes abonnés m'a demandé cette semaine combien de temps encore durerait ce ramadan méditatif ! C’est donc aujourd'hui la rupture du jeûne et je vous retrouve avec plaisir. A propos de ramadan et de prière...

La prière : prescription et lien

Dans mon quartier les appels du muezin (mot turc qui se dit en arabe mu'adhin, celui qui appelle) redoublent de force en cette période sacrée. Les 5 prières quotidiennes sont plus longues, plus intenses, surtout celle de 4h du matin !

Prier 5 fois par jour en islam est une obligation. La salat, la prière rituelle, est un des 5 piliers de l’islam. J'aurais personnellement beaucoup de mal à entrer dans une religion construite autour d'obligations et d'exigences rituelles, mais je dois reconnaître que la salât dit quelque chose d’intéressant sur ce que prier veut dire. Salât en arabe cela signifie « lien, connexion ». Pour le musulman la prière n’est donc pas premièrement une demande, une requête, une intercession, mais l’entrée dans la présence de Dieu ; une sorte d’élévation de soi vers le divin. On vient à Dieu sans arrière-pensée, sans intérêt, juste parce qu’il est Dieu et que nous sommes ses créatures.

Mais les protestants ont horreur des obligations ! Ils ont davantage le souci du sens, ils interrogent la prière, la parole et les gestes. Par exemple, quand l’apôtre Paul exhorte les chrétiens de Thessalonique à « Priez sans cesse », le protestant, au lieu de se mettre à prier 24/24 et 7/7, préfère s’interroger sur la signification d’une telle parole.

Un hadith raconte le voyage nocturne du prophète Muhammad de la Mecque à Jérusalem. Alors qu'il est enlevé jusqu’au septième ciel. Le prophète reçoit d’Allah la prescription de prier 50 fois par jour. En redescendant, le prophète rencontre Moïse au deuxième ciel qui lui dit : « 50 fois par jour ?! C’est trop ! Les fidèles n’arriveront pas à suivre, remonte voir Allah et renégocie ! » Le prophète reprend alors l'ascenseur et  Dieu lui fait grâce de 5 prières par jour (une prière valant 10 !). Moïse lui dira à nouveau que 5 fois par jour, c’est trop et que les fidèles auront bien de la peine à supporter le rythme ! L’obligation finit par décourager. Moïse le savait...

L’apôtre Paul serait-il encore plus exigeant que Dieu en demandant de prier sans cesse ? Même les cisterciens qui prient beaucoup finissent par dormir un peu ! Cela veut donc dire autre chose. Prier sans cesse, c'est chercher à vivre chaque minute, chaque mouvement dans la connexion à Dieu. Que l’on mange, que l’on travaille, que l’on s’amuse ou que l’on dorme, chaque respiration de notre vie a vocation à devenir prière qui dit à Dieu : « Tu es là, je le sais ». Prier sans cesse n’est pas un commandement, c’est un horizon. Mais il reste à savoir comment cette parole peut prendre consistance dans nos vies.

La Bible ne le dit pas. Aucune méthode pour faire nous des moulins à prières n’est enseignée. Même le « Notre Père » n’est pas un commandement. C’est à chacun de trouver son chemin de prière, le but étant d'ouvrir sa vie à Dieu, de rester connecté.

L'allégorie de la tringle à rideau

Connaissez-vous la méthode du rideau ? Je l’ai entendue dans une prédication et elle peut nous aider à repenser notre vie de prière. Celle-ci est comme un rideau accroché à une tringle. Plus vous ajoutez des passants et moins votre rideau se traîne. Chaque anneau représente un moment de prière, un rendez-vous qui maintient le lien avec Dieu. A l’inverse, il y a des vies de prière qui se traînent parce qu’on les délaisse, on ne cherche plus à leur donner de la hauteur, de la visibilité.

Je l’ai dit tout à l’heure, les protestants sont souvent réfractaires aux règlements, aux rituels et aux méthodes. Certains diront qu’il ne sert pas à rien de suspendre nos vies à des instants particuliers comme le font les musulmans avec leurs salat quotidiennes Tout cela n’engendre que légalisme, découragement et culpabilité !

Liberté chérie...

Nous plaidons plus volontiers pour une relation avec Dieu libre et ouverte avec comme principe général ces paroles de Paul : « Quoi que vous fassiez, en parole ou en œuvre, faites tout au nom du Seigneur Jésus, en rendant grâces par lui à Dieu le Père » ou encore « Quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu ». Au diable les rideaux et les béquilles : on est appelé à vivre librement chaque instant dans la présence de Dieu pour sa seule gloire !

C’est beau la liberté ! Mais on peut aussi opposer cet avertissement de Paul qui nous met en garde : « Ne faites pas de la liberté un prétexte pour continuer à vivre dans le péché ou dans l’oubli de la vie de prière. » (Gal 5.13)

A force de remplir nos vies de liberté nous risquons de les vider de toute pratiques religieuses, de repères fixes comme le culte, la lecture de la Bible ou la prière. Notre vie chrétienne devient un e coquille vide ; plus rien ne la distingue de celle d'un non croyant.

Prier, c'est aimer

Pour moi la prière est un peu comme l'histoire d’un couple. Au début quand on est amoureux transis, on a besoin de se voir tout le temps, on se cherche de manière obsessionnelle ; et quand on est ensemble, on bégaye, on cherche ses mots... Avec les années, on apprend à se connaître. La complicité de langage et de sensibilité devient si forte qu’on n’a plus besoin de mots pour se comprendre, on vit l’amour de l’autre, dans la présence comme dans l’absence, d’une manière moins angoissée, plus profonde, plus libre. Mais qu’on soit un jeune couple ou un vieux couple, on a toujours besoin de rendez-vous pour se parler ! Telle est la prière : elle a ses temps, ses façons propres, ses petits rendez-vous, ses petits rituels amoureux. Si on les néglige, on s’expose à un effritement du lien, de la connexion avec Dieu.

Quelque part entre règle et liberté, entre méthode et improvisation, entre programmation et inspiration, se trouve notre vie de prière.

Le musulman commence sa prière en récitant le premier verset du Coran (et de la plupart des sourates) : « Bismillah ar Rahman ar Rahim » (« Au nom de Dieu, le miséricordieux, celui des miséricordes », ce qu’on pourrait traduire par : "Au nom de Dieu, celui de l’amour et de tous les amours". N’est-ce pas une très belle façon d'aborder le divin ? Le chrétien lui, utilise le langage intime de l'enfance : « Père que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne… ». N’est-ce pas tout aussi magnifique ? L’important, sœurs et frères, c’est de prier ! Que vous soyez accrochés à un rideau ou suspendu à votre liberté ! Priez sans cesse !